Qu'elle soit pratiquée en agriculture ou en foresterie, la monoculture consiste à cultiver ou à planter une seule espèce végétale à la fois sur de vastes étendues de terre avec un système de culture à faible intensité de main-d'œuvre, mais qui nécessite des moyens technologiques plus avancés.
Il s’agit d’une pratique qui permet d’être productif car on utilise des techniques de production et d’exploitation de manière répétée sur des grandes surfaces. C'est donc une pratique courante, mais qui possède ses défauts. Les monocultures les plus populaires aujourd’hui sont celles des céréales (blé, soja, maïs), de la canne à sucre et du coton. Ou encore en foresterie, avec entre autres l’eucalyptus et le pin.
Dans ce blog, nous allons explorer cette monoculture, en mettant en lumière ses avantages, ses inconvénients et les points importants à garder en tête.
Doit-on continuer vers ce chemin de la monoculture en masse ?
Un peu d'histoire
Initialement, les monocultures sont apparues par nécessité, introduites pour faire face à un besoin croissant en alimentation.
Malgré tout, il est difficile de fixer une date spécifique des débuts de la monoculture, car elle s’est développée progressivement au fil du temps avec l’évolution des pratiques agricoles.
Cependant, on peut retracer les premières pratiques de la monoculture à l’époque de la première révolution agricole, également appelée “Révolution néolithique” qui s’est déroulée entre 10 000 et 2 500 ans av. J.C.
L'avènement de l’agriculture industrielle aux XIXe et XXe siècle a marqué une nouvelle ère pour la monoculture : Les avancées technologiques, l’utilisation d’engrais chimiques, de pesticides et de machines agricoles ont permis d’augmenter considérablement les rendements, mais ont également intensifié les pratiques de monoculture à grande échelle, souvent pour répondre à la demande croissante des marchés mondiaux.
Après la seconde guerre mondiale, l’agriculture française qui était alors familiale et parcellaire s’est transformée et s’est rapprochée des modèles américains en favorisant des structures agricoles de taille moyenne, de 30 à 50 ha, disposant d’outils modernes et mobilisant des pratiques agronomiques intensives. C’est le plan Marshall et c’est aussi les débuts de la monoculture en France.
Défis et Paradoxes
Selon les estimations de l’Organisation des Nations unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), en 2050, lorsque la population mondiale atteindra 9 milliards de personnes, la demande alimentaire augmentera de 70%.
De plus, il est à noter que dans le monde occidental, depuis ces cent dernières années, la population rurale est passée de 50% à 20%. Ce pourcentage de la population de plus en plus petit doit alors nourrir l'ensemble de la population mondiale de plus en plus grand.
Tout cela pour de moins en moins d'aides et de considération pour le travail de ces agriculteurs.
Dans un effort d'augmenter la productivité, l'industrie agroalimentaire se tourne donc de plus en plus vers la monoculture, qui est plus prolifique, mais demande bien plus d'engrais et de pesticides (herbicide, fongicide...) car il s'agit d'une pratique agricole qui est plus rapidement impactée par les maladies.
Cette situation laisse à penser que la production à grande échelle par le biais de monocultures pourrait satisfaire les besoins à venir car elle représente le moyen le plus efficace d'optimiser les rendements et les profits. Cependant, cette industrie extensive, bien que générant beaucoup de quantité, ne serait pas une solution mais plutôt un problème, car elle détériorerait les terres productive entrainant une dégradation des sols sur le long terme.
C'est pourquoi il devient impératif de promouvoir et de faciliter la pratique de la polyculture notamment en agriculture biologique, afin que des approches plus durables puissent se généraliser.
Avantages de la monoculture
Pour l'agriculteur ou le forestier :
Simplicité de gestion - Spécialisation et concentration sur une seule espèce de la semence à la récolte (voire jusqu'à la commercialisation) dans le but d'optimiser les pratiques agricoles spécifiques à celle-ci que ce soit au niveau de la surveillance (maladie, ravageur), de l’entretien (besoin en eau, engrais) et de l'équipement (machines spécifiques) car les besoins et la croissance sont similaires. Il n'y a pas besoin d'être spécialisé dans le domaine et de réfléchir à quelles associations de plantes faire
Efficacité économique - Réduction des coûts de capital et de la main d'œuvre tout en augmentant l'efficacité de l'utilisation des terres. Dans un contexte de demande croissante en produits alimentaires et agricoles, cette approche apparaît comme un atout indispensable.
Cela implique une réduction des coûts liés à la diversification des cultures se traduisant par l'utilisation d'un seul type d’équipement et de fertilisant.
Rendements élevés et prévisibles - l’ensemencement massif du même type de plante permet une efficacité dans sa production grâce à la concentration des ressources sur cette seule espèce. Cette approche permet une optimisation des pratiques agricoles pour atteindre des rendements en grands volumes et plus maîtrisés à moindre coût.
Pour nous, consommateurs :
Disponibilité et accessibilité - La concentration sur une seule culture permet une production à grande échelle, ce qui assure une disponibilité constante des produits sur le marché. Le consommateur a alors accès à un large panel d'aliments toute l'année indépendamment des saisons de croissance.
Coûts stables et abordables - Les produits issus de monoculture ont tendance à être bien plus abordables que ceux issus d'agriculture biologique.
Uniformité et qualité constante - Les produits sont homogènes en termes de taille et de goût. Cette uniformité facilite la satisfaction des attentes des consommateurs et offre une expérience culinaire plus prévisible
Innovation et diversification des produits transformés - La disponibilité constante de matières premières encourage les industries à développer une variété de produits dérivés en tout genre, offrant aux consommateurs choix encore plus large de transformation de son aliment préféré
Cependant, l'émergence de la monoculture, généralement pratiquée sur de très grandes fermes, comme modèle dominant entraîne son lot de problèmes pour l’écosystème.
Inconvénients de la monoculture
Appauvrissement des sols - Surexploitation du sol qui devient fragilisé et érodé, le rendant moins fertile au fil du temps, entraine un impact sur son écosystème naturel composé de micro-organismes, de microfaune, de champignons, etc. dont il a besoin pour fonctionner. La monoculture détruit cette biodiversité naturelle.
Dépendance aux intrants chimique - L'épuisement des nutriments du sol (vu plus haut) entraine l'utilisation de plus d'intrants chimiques tels que les pesticides ou les engrais pour compenser ce manque et maintenir la productivité en monoculture. L’utilisation réitérée de mêmes fertilisants chimiques rend le sol dépendant de ces pesticides et en demande encore plus.
De plus, l'utilisation réitérée des mêmes produits chimiques pour combattre les parasites et les maladies peut finir par en faire apparaître de nouveaux qui y résistent. À long terme, le sol devient alors inutilisable.
Cette dépendance a aussi des effets sur le produit en question qui finit par être très chimique.
Augmentation de la vulnérabilité aux maladies et aux ravageurs (nuisibles, incendies ...) -
Offre de conditions idéales aux nuisibles et aux maladies spécifiques à l'espèce.
N’ayant pas d’autres plantes pour prendre le relai, ils ont le pouvoir de se propager rapidement et d’ainsi décimer l’intégralité de la récolte.
Certaines espèces sont plus inflammables ou simplement s’enflamment de la même façon donc très gros risque de perte également s'il n'y a pas de diversification.
Un risque de faillite s'installe alors s'il y a une maladie spécifique de la plante ou un sinistre climatique.
Le principe est le même qu’un élevage en batterie, on augmente les chances de contracter une maladie en rassemblant autant d'animaux d'une même espèce dans un espace restreint.
Déforestation - Au profit des cultures et des pâturages. Sans compter les monocultures étrangères sur laquelle la France assure une bonne partie de son importation.
Les forêts hébergent 80% de toute la biodiversité, il est estimé que près de 27 000 espèces végétales et animales disparaissent chaque année en raison de la déforestation. Leur présence ne couvre que désormais que 30% de la surface terrestre là où elles en occupaient 66% il y a 400 ans.
Perte de la diversité alimentaire - Avec des siècles de récoltes, d’ensemencement, où seules certaines espèces plus résistantes et plus faciles à cultiver ont été sélectionnées pour atteindre la perfection, nous avons perdu actuellement une grande partie de la diversité des aliments que nous consommons. Les chiffres indiquent que douze types de plantes et cinq types d’animaux représentent déjà 75% de l’alimentation mondiale. La réduction des espèces cultivées limite la diversité génétique compromettant ainsi la sécurité alimentaire à long terme et entrainant de graves conséquences en cas de maladie ou de changement environnementaux.
Perte de la biodiversité et pollution - La monoculture entraîne une utilisation accrue d'insecticides et d'autres pesticides amenant la destruction des habitats d’animaux. Pollution des sols et des eaux par les engrais et les pesticides utilisés en trop grandes quantités se retrouvant aussi dans les nappes phréatiques et les littoraux.
Si nous prenons l'exemple du milieu forestier, en ne cultivant qu'une espèce d'arbres, la biodiversité de la forêt devient pauvre, ce qui réduit les habitats disponibles pour la faune.
Exemples de problème liés à la monoculture :
Grande Famine d'Irlande
En effet, la grande famine d'Irlande qui a eu lieu entre 1845 et 1852, a vu ses cultures de pomme de terre ruinées par le mildiou (maladie causée par un champignon parasitaire), ce qui a affecté énormément d'habitants puisque depuis le début du XIXe siècle, cette denrée constituait l'essentiel du régime alimentaire d'au moins la moitié de la population. La pomme de terre très nourrissante est facile à cultiver et pousse à peu près n'importe où.
Au total, c'est un million de morts et un autre million qui a dû s'exiler vers l'Amérique du Nord et la Grande-Bretagne principalement, faisant chuter la population du pays de 8.5 à 6.5 millions d'habitants en l'espace de 6 ans. L'émigration devint dès lors un phénomène structurel et se poursuivit jusqu'en 1911, date à laquelle la population irlandaise tomba à 4.4 millions de personnes.
Feux de forêts de 2017
En 2017, le Portugal a été victime d'importants feux de forêts qui ont détruit 442 000 ha de végétation entre début janvier et fin octobre, atteignant un record historique. Le Portugal a alors perdu 4% de ses surfaces boisées, la plus grande proportion tous pays confondus et près de la moitié des forêts calcinées dans toute l'Union Européenne.
En cause : L'eucalyptus, largement cultivé au Portugal en monoculture pour l'industrie du papier en raison de sa croissance rapide, est un arbre non-indigène à la région et hautement inflammable.
Son cycle de croissance rapide (10-15 ans) est particulièrement exploité dans l'industrie papetière.
Suite aux incendies de 2017, des lois ont été votées pour réduire la propagation de l'eucalyptus. Le parlement portugais a adopté 3 textes de loi dans le cadre d'une réforme des forêts visant à réduire la plantation d'eucalyptus.
Solutions et Alternatives
Les conséquences de la monoculture sont donc "bénéfiques" pour le producteur à court et moyen terme, mais peuvent s'avérer catastrophiques à long terme.
La pratique de la monoculture doit être modifiée pour les années à venir, car des dommages irréversibles ont de fortes possibilités de se produire. Fort heureusement, des solutions à notre portée et pouvant donner des résultats rapidement existent aujourd’hui. Il est donc important de sensibiliser et d'aider les agriculteurs à travailler avec des méthodes durables dans de bonnes conditions afin qu'ils aient les outils nécessaires pour œuvrer correctement et ne pas éroder les sols.
Pour permettre de minimiser l’impact négatif, Il existe des techniques telles que :
La polyculture - Il s’agit d'associer sur une même terre, différentes espèces entre elles afin qu’elles se complètent et utilisent au mieux les nutriments du sol. Ainsi, le sol ne s’appauvrit pas, ne mettant pas en danger la microfaune naturelle.
Ce système agricole est plus productif et permet d'autant plus de contrôler les ravageurs et les maladies, et améliore la défense contre les agresseurs externes. Ce qui peut réduire l’utilisation des pesticides.
La rotation des cultures - Cette pratique consiste à planter différentes cultures sur la même parcelle à des intervalles réguliers, c'est-à-dire, différentes plantes à différents moments sur la même terre dans le but de prévenir l’épuisement des sols, augmenter sa fertilité, de lutter contre les parasites, les maladies et autres ravageurs spécifiques à l'espèce récoltée qui la déciment.
Une rotation bien réfléchie peut permettre des économies d'intrants.
Particularité des légumineuses (légumes-graines) : Toutes les plantes ont besoin d'azote pour se développer, mais, seules les légumineuses peuvent capter l'azote présent dans l'air par leurs racines. Lorsqu'elles sont ensuite récoltées, elles laissent alors l'azote dans le sol pour les suivantes.
C'est la raison pour laquelle ces espèces sont intéressantes en agriculture biologique.
Agroforesterie / agroécologie - Association de divers éléments arborés tels que haies, arbres, bosquets au sein d'une même parcelle dans les surfaces agricoles imitant dans une certaine mesure la diversité et la fonctionnalité des écosystèmes naturels.
Cette pratique favorise la biodiversité en luttant contre l'érosion des sols, en créant un micro climat propre à la parcelle qui influence son humidité et la vitesse des vents.
De plus, elle agit comme refuge pour la biodiversité et peut même offrir un micro habitat aux prédateurs naturel de nos nuisibles. La transition agroécologique : pourquoi l’innovation devient indispensable ?
Mais pour arriver à cela, quelques exemples d'actions possibles :
Reboisement et réduction de la déforestation - Encourager le reboisement des terres dégradées par la monoculture. Varier les essences.
Protection des forets indigènes - Renforcer la protection en établissant des aires protégées, en appliquant des politiques antidéforestation.
Education environnementale - Renforcer les programmes d'éducation environnementale pour sensibiliser les agriculteurs, les communautés locales et autres acteurs sur l'environnement à la préservation de la biodiversité.
Importance de la diversité alimentaire - Pour nous, consommateurs, il est essentiel d'adopter les bons gestes en promouvant la diversité alimentaire et en soutenant des pratiques agricoles et forestières durables dans le but de préserver notre environnement : circuits courts, aliments de saison, aliments issus d'exploitations respectueuses de l'environnement, aliments labellisés, ...
Bien que la monoculture puisse nous être utile personnellement pour son prix plutôt bas et sa disponibilité il est important de varier sa nourriture pour une alimentation saine et équilibrée tout en préservant notre planète.
Si de nos jours on diminue la “spéciation” (sélection de certaines espèces au détriment d’autres), cela permettra aux populations de s’adapter à leur environnement par mutation et sélection naturelle et donc d’enrichir la diversité génétique.
Les agriculteurs et les chercheurs travaillent constamment pour trouver un équilibre entre ces avantages et inconvénients tout en explorant des méthodes pour rendre l'agriculture plus durable et résiliente.
Pour ceci Il est crucial de continuer à explorer ces méthodes alternatives tout en continuant à promouvoir des pratiques agricoles qui préservent à la fois notre planète et notre sécurité alimentaire sur le long terme.
Le saviez vous ?
En Suisse, il n'existe pas de monoculture.
Selon une étude de l'équipe dirigée par le professeur et écologiste Christian Schöb de l'ETH Zurich, les cultures mixtes généreraient un rendement bien plus supérieur aux monocultures dans les cultures arables. Leur étude a été publiée dans la revue Nature Plants.
La banane Cavendish, que l’on connaît tous et qui représente la grande majorité de la production de banane, est stérile (elle n’a ni pépin ni noyau). Sa propagation se fait par clonage. Toutes les bananes que nous consommons sont issues de la même monoculture, ce qui expose le fruit à de graves épidémies. La Cavendish pourrait disparaître d'ici à quelques années. La maladie du panama (un champignon dévastateur) est aujourd'hui une des plus grandes menace de l'espèce.
Plus de 90% des variétés d'aliments cultivés ont disparu des champs au cours des 30 dernières années. En savoir +
Une étude de l’Université de Zurich a montré qu’il est possible d’obtenir de bons rendements tout en promouvant la biodiversité. Ce constat a été souligné notamment par le professeur Hans Pretzsch de la chaîne d’études sur la croissance forestière. Il a constaté que les coûts et les pertes de monoculture sont deux fois plus élevés que les investissements mondiaux qui devraient être faits pour préserver la biodiversité.
A la fin des années 90, une étude réalisée dans une rizière en Chine mettait déjà en évidence les bienfaits de la biodiversité. Des chercheurs ont planté des variétés de riz vulnérables à un certain champignon avec des variétés résistantes. Les résultats ont montré une augmentation de 84% de productivité dans les rizières mixtes tandis que le taux d'infection a chuté de 94% comparé aux monocultures. Cette réussite à conduit les cultivateurs à abandonner l'utilisation des fongicides.
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